Les Américains ouvrent la consommation, les chercheurs français luttent contre l’addiction. Alors que le Colorado et l'Etat de Washington ouvrent la vente légale du cannabis aux consommateurs âgés d’au moins 21 ans et jusqu'à 28 grammes de cannabis par achat, 2 équipes de chercheurs français de l’Inserm travaillent à la découverte du médicament qui va protéger le cerveau de l’addiction. Leurs premiers résultats qui ouvrent la voie à de nouvelles approches thérapeutiques contre l’addiction au cannabis sont publiés dans l’édition du 3 janvier de la revue Science.
Les équipes de l'Inserm viennent en effet de découvrir qu'une molécule produite par le cerveau, la prégnénolone, constitue un mécanisme naturel de défense contre les effets néfastes du cannabis chez l'animal. La molécule empêche le THC (tétrahydrocannabinol) d'activer ses récepteurs cérébraux, dont le récepteur CB1 dont la sur-activation par le THC est responsable des effets du cannabis.
Giovanni Marsicano, chargé de recherche Inserm à l'université Bordeaux Segalen, qui a dirigé les recherches et travaille depuis longtemps sur ce récepteur CB1, avait déjà exposé le mécanisme cellulaire d'action du cannabis sur la mémoire de travail dans une récente étude publiée dans la revue Cell. L'addiction au cannabis concerne plus de 20 millions de personnes dans le monde et un peu plus d'un demi-million de personnes en France. 30% des jeunes en consomment, avec le danger de séquelles cérébrales permanentes. Le communiqué de l'Inserm insiste sur 2 troubles majeurs du comportement associés l'usage du cannabis: Des déficits cognitifs et une perte généralisée de la motivation. C'est la sur-activation des récepteurs CB1 par le THC qui entraîne cette diminution des capacités de mémorisation, une démotivation et progressivement une forte dépendance.
La pregnenolone, considérée jusqu'alors comme un précurseur inactif des hormones stéroïdiennes (progestérone, testostérone, …), s'avère avec cette recherche, une molécule clé de défense naturelle contre le cannabis : En bloquant la sur-activation de CB1 par le THC, elle permet de protéger le cerveau des effets du cannabis et s'avère une base prometteuse de nouveaux traitements de l'addiction. Ainsi, lorsque les chercheurs en administrent à des souris (entre 2 et 6 mg/kg), ils parviennent à bloquer les effets néfastes du cannabis et les animaux traités récupèrent des capacités de mémoire normales et sont moins motivés à s'administrer des cannabinoïdes.
Lorsque les chercheurs font l'expérience sur des cellules en culture qui expriment le récepteur CB1 humain, l'efficacité de la prégnénolone pour contrer l'action moléculaire du THC est à nouveau démontrée.
De nouvelles approches thérapeutiques en vue: Les chercheurs ont déjà développé des dérivés de la prégnénolone qui sont stables et bien absorbés et qui sont en principe utilisables comme médicament et espèrent commencer très prochainement les essais cliniques.
Communiqué Inserm Découverte d'une molécule qui protège le cerveau d'une intoxication au cannabis et Science 3 January 2014 DOI: 10.1126/science.1243985 Pregnenolone Can Protect the Brain from Cannabis Intoxication
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