Ne pas boire d'alcool du tout est en effet associé à plus de congés de maladie qu'une consommation modérée. En synthèse les personnes qui boivent modérément ou raisonnablement ont une meilleure santé et sont donc moins susceptibles de « manquer ». C’est la conclusion de cette étude présentée dans l’excellente revue addiction, étude menée auprès de près de 50.000 participants au Royaume-Uni, en Finlande et en France et qui apporte un excellent exemple d’association indirecte liée à des facteurs de confusion, en l'occurrence des conditions médicales pré-existantes.
Car l’étude ne signifie pas que boire de l'alcool vous apporte une meilleure santé, mais que boire modérément est un signe de bonne santé, en général, ce qui n’est pas le cas de l’abstinence totale d’alcool, qui peut être motivée par un problème de santé pré-existant. De plus l’étude révèle également une association entre l’abstinence et l’appartenance à un milieu socioéconomique défavorisé, un facteur lui-même associé à un risque accru de mauvaise santé…Enfin, l’étude suggère aussi, qu’en matière d’alcool comme de régime alimentaire, qu’« un peu n’est pas forcément mauvais » pour la santé.
Les chercheurs du Finnish Institute of Occupational Health, de l’Université d’Helsinki et de Turku (Finlande) de l’University College London (UK), de l’INSERM et de l’Université Paris Descartes ont effectué cette méta-analyse des données de 4 études de cohorte menées dans 3 pays auprès 47.520 participants au total. Chaque étude apportait des données sur la consommation d'alcool à 2 points dans le temps et sur les congés maladie durant la période de suivi. Les participants ont été qualifiés comme abstinents, consommateurs à faible risque (1 à 17 unités par semaine pour les femmes, 1 à 34 unités par semaine pour les hommes aux 2 moments), consommateurs réguliers (plus de 17/34 unités hebdomadaires pour les femmes et les hommes), « anciens » buveurs à risque (plus de 17/34 unités au premier point, mais pas au deuxième), buveurs à risque récent (plus de 17/34 unités au deuxième point, mais pas au premier).
L’analyse montre que vs Comparé aux buveurs à faible risque,
- les abstinents sont 58% plus susceptibles de prendre un congé maladie pour maladie mentale, en moyenne durant 2,2 jours par an vs 1,4 jour ;
- les abstinents sont 26% plus susceptibles de s'absenter pour troubles musculosquelettiques, en moyenne durant 4,2 jours par an vs 3,1 jour ;
- les abstinents sont 38% plus susceptibles de s'absenter pour troubles digestifs, en moyenne durant 0,3 jour par an vs 0,2 jour ;
- les abstentionnistes sont 35% plus susceptibles de s'absenter pour troubles respiratoires, en moyenne de 0,6 jours par an vs 0,4 jour ;
- les buveurs réguliers, à risque persistant, sont 32% plus susceptibles de s'absenter pour cause de blessure ou d'empoisonnement, en moyenne durant 1,5 jour par an vs 1 jour pour les buveurs à faible risque ;
- aucune différence dans les congés maladie n’est constatée entre les anciens et nouveaux buveurs à risque vs buveurs à faible risque.
Une courbe en forme de U : les chercheurs concluent donc à une association en forme de « U » entre la consommation d'alcool et les congés maladie. Et, en particulier, l’abstinence totale d’alcool semble associée à plus d’absence pour conditions de santé mentale et physique tandis qu'une consommation excessive d'alcool est associée à des blessures ou à des empoisonnements.
Source: Addiction June 6 2018 doi:10.1111/add.14249 Sickness absence diagnoses among abstainers, low-risk drinkers and at-risk drinkers: consideration of the U-shaped association between alcohol use and sickness absence in four cohort studies
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