Quelques études ont suggéré qu’une consommation très modérée d'alcool pouvait réduire le risque de démence, plus tard dans la vie. Cette étude le confirme mais attire notre attention sur un effet de seuil fatidique. Elle révèle, dans le British Medical Journal, que non seulement que les personnes qui ne consomment pas d'alcool à un âge moyen sont 45% plus susceptibles de développer une démence que celles qui en consomment dans les limites recommandées, mais aussi que le risque de démence augmente fortement chez les personnes qui boivent au-dessus des limites recommandées.
Les chercheurs de l'Université Paris-Saclay et Paris Diderot et de l'University College London ont analysé les données de la cohorte Whitehall, soit de 9.087 fonctionnaires britanniques, suivis depuis 1985, âgés de 35 à 55 ans à l’inclusion dans l’étude. Au cours du suivi, les chercheurs ont documenté leurs habitudes de consommation, leur mode de vie et leur santé : tous les 5 ans, les participants ont fait l'objet d'une évaluation clinique par une infirmière et rempli des questionnaires sur leur mode de vie, y compris sur leur consommation d'alcool. Les participants ont été répartis en groupes, selon leur niveau de consommation, abstinents, buveurs réguliers (entre 1 et 14 unités par semaine) et buveurs excessifs. Au total, 397 personnes ont développé une démence. Enfin, les chercheurs ont pris en compte les facteurs de confusion possibles. L’analyse montre que :
- l’incidence de la démence est plus élevée en cas de tabagisme, d’obésité, de maladie cardiovasculaire ou de diabète ;
- les participants qui ne consomment pas d’alcool, ou très occasionnellement sont plus susceptibles de développer une démence. Mais ces personnes à risque plus élevé ont peut-être cessé d’en consommer à cause de problèmes de santé…
- Précisément, par rapport aux buveurs réguliers, les « abstinents » s’avèrent 45% plus susceptibles de développer une démence ;
- chez les buveurs excessifs, chaque unité excédentaire augmente le risque de démence de 18% ;
- les abstinents exempts de maladie cardiovasculaire ou de diabète n’ont pas d’augmentation du risque de démence.
Ainsi, le risque de démence est augmenté chez les personnes abstinentes à la quarantaine ou qui consomment plus de 14 unités d’alcool / semaine. Mais pourquoi les personnes abstinentes sont plus susceptibles de développer une démence reste mal compris. D’autant que cette augmentation du risque n'est plus significative lorsque les personnes atteintes de maladies cardiovasculaires ou de diabète sont exclues du groupe.
Cela suggère que ces conditions pourraient être des facteurs de risque de démence et la raison de l'abstinence à l'âge mûr.
Source : BMJ August 1 2018 DOI : 10.1136/bmj.k2927 Alcohol consumption and risk of dementia: 23 year follow-up of Whitehall II cohort study
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